Vers la tendresse

Vers la tendresse

Four young men from the Paris suburbs talk about their masculinity. Their interior monologues, however, reveal other desires.

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 “Je voulais faire une fiction sur la relation amoureuse entre les filles et les garçons. J’ai donc été poser deux questions à quatre hommes, dans le cadre d’un atelier de repérage. « C’est quoi pour toi la tendresse ? » était une de ces questions. J’ai mis deux ans et demi à comprendre et à décider d’utiliser ces enregistrements minables, que j’avais faits pour documenter les entretiens. J’ai dû mettre des images sur ces voix.”

Laure Vermeersch1  

 

« À Montreuil, des garçons traînent devant chez moi du matin jusqu'au soir. Je me suis dit qu'ils pourraient peut-être porter leur voix et je suis allée les voir. Je leur ai proposé de travailler avec moi et j'ai organisé un atelier avec quatre d'entre eux. En entendant ce que j'avais filmé, ils ont prétendu ne pas s'y reconnaître ; mais m'ont parlé différemment lorsqu'on s'est vus en tête-à-tête. » Elle a isolé des scènes de leur vie quotidienne susceptibles d'être jouées par eux et d'éclairer certaines paroles recueillies auprès de ses premiers interlocuteurs. C'est ainsi qu'elle nous les montre à la terrasse d'un kebab ou en voiture, s'en allant passer comme tant d'autres le week-end à Bruxelles. « Ils y prennent des cuites, dépensent leur argent avec des prostituées du "quartier rouge", où abondent les plaques immatriculées 93, 94... et en reviennent tout penauds le lundi, aux aurores. » Cette virée bruxelloise constitue l'un des moments clés de Vers la tendresse. Le plus révélateur de la solitude de jeunes hommes incapables d'envisager l'amour sur un mode moins fruste. Leur répond, en toute fin de séquence, le regard hypnotique d'une femme puissante, comme hors d'atteinte derrière sa vitre. « Ça n'était pas une prostituée, confie la documentariste. Je l'ai vue dans un bar, je l'ai trouvée très belle et elle a accepté de jouer dans mon film. Elle me rappelait certaines images de la photographe sud-africaine Zanele Muholi, qui s'est représentée dans les vitrines d'Amsterdam. »”

François Ekchajzer2

  • 1Laure Vermeersch, "Vers la tendresse: Entretien avec Alice Diop", Vacarme, 2016/3 (N° 76), pp. 103-115.
  • 2François Ekchajzer, "'Vers la tendresse', magnifique film sur l'amour dans les 'quartiers'", Télérama, 2017.
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